Mexique - San Cristobal de las Casas

Publié le par Yolou

Vendredi 06 novembre, 19h15: grosse étape cette nuit. Nous quittons le Yucatan pour le Chiapas -toujours au Mexique-, direction San Cristobal de las Casas. En soi, ce n'est pas si loin de Merida: tout au plus 750 bornes. Sauf qu'à la sauce (piquante) mexicaine, ca donne 14h de bus... Soit une moyenne extraordinaire de... 53km/h. En fait, le début est plutôt sympa: 550 km de voie rapide, ca roule tout seul. Non, le problème, ce sont surtout les 200 derniers kilomètres: de la petite route de montagne, bien défoncée, bien sinueuse, bien risquée, que l'on met 6h30 à franchir. Autant dire qu'à l'arrivée, on n'était pas frais... Ah, et puis comment ne pas parler des joie du bus de nuit: des arrêts toutes les 2h dans les villages pour déposer ou prendre des gens, la clim à fond, les ronflements des voisins, la télé qui braille, les dos-d'âne incessants sur la route, etc. Ceci dit, les sièges étaient propres, confortables, semi-inclinables, de la place pour les jambes, on peut espérer somnoler un peu! Eh oh, pour 25 euros, t'as droit à la première classe, on va pas chipoter, hein! Dans le bus, nous avons l'impression d'être suivis: trois jeunes Françaises semblent faire le même itinéraire que nous, depuis quelques étapes. Au fait, à quoi reconnaît-on des Français à l'étranger? Facile: ils ont tous le guide du Routard dans la main, un sac-à-dos Quechua (merci Décathlon, le reste c'est trop cher!), un accent espagnol ridicule, dînent dans les mêmes restaus recommandés par le Routard, et surtout ILS NE SE PARLENT JAMAIS ENTRE EUX! C'est là une règle d'or qu'on a pu observer: ne jamais adresser la parole à un autre Français à l'étranger. Bien plutôt lui lancer un regard venimeux de défiance, du genre « je sais que tu es Français, mais ne cherche surtout pas à vouloir être mon ami », et partir fièrement. Deux Anglo-Saxons qui se croisent se mettent immédiatement à discuter, deux Français qui se croisent s'ignorent superbement. Ne me demandez pas pourquoi, c'est comme ça. C'est con, hein? Bah oui, c'est français... Mais revenons à notre bus: lever de soleil fabuleux vers 6h sur les montagnes du Chiapas. Le ciel est rose, les sommets encore embrumés, nous traversons des vallées étouffées de végétation, entrecoupées par moment de magnifiques cascades. C'est beau comme c'est pas permis! On en oublierait presque les nausées du bus... Mais toute médaille a son revers: le contraste est saisissant entre la beauté du décor et la pauvreté de la population. Nous traversons des villages perdus, accrochés à flanc de colline, où les gens se déplacent à pied le long de la route, en charrette ou à dos d'âne. Seul détail immuable dans tous ces patelins: les pubs Coca Cola, présentes même dans le trou du cul du monde (merci la mondialisation!)... Arrivée à San Cristobal à 9h15 du mat. Premier constat: ça caille le matin, à 2100 mètres! Entre Merida et ici, la température a carrément été divisée par deux (on reste aux alentours de 16°C, c'est pas la mort non plus, hein!). La station de bus est assez excentrée. Trop fatigués pour marcher, nous prenons un taxi jusqu'à l'auberge de jeunesse. Raté, plus de place! Entre-temps, le taxi nous a lâché, nous sommes bons pour trouver un autre hébergement à pied. Nouvelle auberge, tenue par des Français. De la place pour deux nuits seulement? Ca ira. Sitôt posés, une seule priorité: prendre une douche. La dernière remonte à 24h, et nous traînons de tels relents de chacal que même les moustiques ne veulent plus nous becqueter! Deuxième priorité: manger. Ce qui est bien au Mexique, c'est que tu peux tout faire à n'importe quelle heure, ya jamais de problème. Un petit dèj à 11h dans un restau? Ca marche. Tu veux dîner à 17h30? Aucun souci. Faire les courses au supermarché à 22h30? Ya nocturne tous les soirs. Prendre un taxi à 3h du mat? Y en a 10 qui t'attendent! Pas d'horaire, pas de 35h, pas de dimanche non travaillé, pas de jour férié chômé... Petite mise en garde pour tout touriste qui s'aventurerait à San Cristobal: attention, vous encourrez le risque de tomber sous le charme de cette ville et de ne jamais pouvoir repartir! Nichée entre les montagnes, San Cristobal est un enchantement, avec ses maisons ultracolorées, ses rues étroites, ses églises baroques, ses petites places tranquilles. Et puis c'est la Katmandou du Mexique! Peuplée de babas cools, d'hippies de tous pays, habillés de ponchos, de pantalons larges en toile, de gri-gri, de piercings, c'est un truc de fou! Nous, avec nos polaires et nos chaussures de marche, on détonne un peu... Quatre jours à San Cristobal: pfff, il faudrait au moins une semaine pour s'imprégner de l'ambiance de la ville. Nous en profitons tout de même pour faire un tour dans les villages mayas tzotziles aux alentours, accompagnés d'un guide. Il faut dire que le Chiapas est la région la plus « indigène » -et la plus pauvre- du Mexique, et c'est là où ont éclaté en 1994 les révoltes zapatistes avec le commandant Marcos. Grande fierté maya, ça, faut pas les chatouiller sur ce sujet... Donc visite d'un « authentique » village tzotzile, version vie quotidienne: tissage des vêtements traditionnels, enfilage des tenues de mariage, « goûtage » des plats typiques, visite du marché, du cimetière, de l'église, tout y passe... Bon, tu payes pour rentrer dans le village, tu payes pour accéder à l'église, tu files un bakchich pour avoir testé la bouffe, tu passes par la case « achat d'artisanat » à la fin, mais mine de rien c'était hyper intéressant. Et puis, ils savent rigoler, ces Tzotziles. Morceaux choisis parmi les commentaires du guide: « Vous savez pourquoi il y a des plumes de poule sur la robe de mariée de la femme tzotile? Parce que, de la même manière que la poule ne peut pas s'envoler loin, la femme ne doit pas quitter le foyer conjugal ni s'éloigner de la maison » (et il te dit ça sérieusement, le mec en plus! Les féministes apprécieront cette magnifique comparaison...) ; ou encore: « le piment, c'est bon pour la mémoire; bin oui, t'en manges aujourd'hui et tu t'en souviens encore le lendemain »; dans la même veine: « le piment, ça pique quand ca rentre, et ca pique aussi quand ça sort » (on confirme...); et puis pour expulser les péchés à l'église, rien de plus simple, faites comme les Tzotziles: amener une bouteille de Coca, buvez-en ½ litre, et rotez: votre péché est expulsé! (la première fois, ça fait bizarre, quand même...). Bon, à part ça, on aurait pu vous parler de la cosmogonie des Mayas, de la dualité des figures religieuses, du syncrétisme, mais c'est beaucoup moins drôle (quoique très intéressant). Nous consulter si vraiment vous voulez des détails... Ceci dit, l'église vaut vraiment le détour, et le culte maya est complètement baroque et original! Très émouvant, par ailleurs (je suis sérieux). Bref, quatre jours fabuleux à San Cristobal, hormis le fait qu'on s'est bien pelés de froid et qu'on a dû changer trois fois d'hébergement: premier déménagement: plus de place dans l'auberge de jeunesse, une conférence sur la psychologie sociale avait lieu dans le coin; deuxième déménagement: nous trouvons refuge dans « la meilleure auberge de jeunesse de toute la ville » selon le guide du Routard, « avec un service de qualité, une bonne ambiance, une belle vue sur la montagne et un petit dèj sympa ». En fait de quoi, nous nous retrouvons dans une chambre « bocal » (c'est-à-dire sans rideau, avec deux grandes baies vitrées en guise de murs; c'est vrai, j'oubliais, on partage tout en AJ, même l'intimité!) au fond du jardin; en guise de service, on doit réclamer deux fois des rideaux (attendez, ils ont été lavés, ils sèchent actuellement...sous la pluie!), qu'on a finalement installés nous-même; les douches, tu commences par t'ébouillanter avant de mouiller toutes tes fringues parce que ya rien pour les poser au sec; la vue, bin oui ya une belle vue... si, si, si tu montes sur le lit et que tu te tords le cou, regarde!; la literie, c'est genre lit de fakir monté sur ressort; quant au petit dèj, il est tellement frugal qu'on a cru qu'on pouvait se resservir (ah les cons!). Bref, vous l'aurez compris, on n'a pas kiffé... D'où notre choix de se faire une « folie » pour la dernière nuit: un hôtel à 18 euros la nuit... Là-bas, à ce prix-là en hors saison, t'as un truc royal, avec lit king size (sans ressorts svp), moquette au sol, salle de bain privée et eau chaude 24h/24h! Histoire de reprendre des forces avant le sinueux voyage en bus vers Palenque...

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